L’après exploitation

Depuis une trentaine d’années, la réglementation oblige les exploitants à remettre en état les sites après exploitation (articles et R512-39-1 à R512-39-6 du Code de l’Environnement). Selon les articles R516-1 et R512-35 du Code de l’Environnement, le dossier de demande d’autorisation doit prévoir les conditions de remise en état, par des garanties financières permettant au préfet de disposer si besoin de la somme nécessaire pour la réalisation des travaux. Les prescriptions de l’arrêté préfectoral d’autorisation reprennent ces obligations réglementaires.
L’exploitant carrier est un utilisateur passager d’un espace qui avait un « avant » et qui doit retrouver un usage et une vocation par la suite. Il faut donc que la remise en état soit étudiée et présentée par l’ensemble des acteurs concernés par cet « après exploitation » et non pas comme le projet du carrier. Ces opérations doivent se préparer avec les élus, les riverains, les associations, les administrations et les propriétaires.
Les exploitations de carrières modifient le paysage, mais n’interdisent aucune utilisation ultérieure des sites. Les remises en état peuvent conduire à un retour à des espaces renaturés mais également à des espaces de loisirs qu’il faut entretenir, que ce soit des espaces verts, des parcs de stationnement, ou encore à des aires urbanisables en bordure d’agglomération, …
Une brochure éditée par le Ministère de l’environnement en 1999 « Remise en état des carrières : principes généraux, recommandations techniques et exemples par type d’exploitation », de B. Odent et M. Lansiart donne des techniques pour mieux intégrer les sites dans l’environnement. Sa conclusion est la suivante : « la qualité de la remise en état d’une carrière peut s’apprécier au délai que met l’ensemble des êtres vivants (plantes, animaux, humains) à la repeupler ».
Pour améliorer l’intégration paysagère des carrières, un guide des bonnes pratiques d’aide à la prise en compte du paysage dans les études d’impact et du milieu naturel a été élaboré en 2006 par la DIREN PACA en collaboration avec la DRIRE PACA, services aujourd’hui réunis dans la DREAL PACA. Il est disponible sur le site internet de la DREAL PACA dans la rubrique Carrières de la thématique Prévention des Risques/Sous Sol.
La revégétalisation des anciennes carrières dépend essentiellement de facteurs techniques :

  • apport de terre végétale en quantité suffisante et d’engrais appropriés,
  • bonne répartition spatiale des espèces végétales,
  • priorités à donner aux espèces autochtones,
  • réalisation d’éboulis au lieu de falaises pour favoriser la repousse de la végétation,
  • gestion de l’écoulement des eaux afin de créer des espaces humides,
  • respect de la dynamique naturelle de reconstitution des milieux,
  • modelage des berges avec création de fonds en pente douce ou abrupte favorables à différents types de colonisation végétale, …

L’introduction de la faune dans les plans d’eau par alevinage est possible, mais c’est la création d’un nouveau biotope correspondant à leurs besoins biologiques qui doit conduire les animaux sauvages à l’occupation de l’espace.
Quant à l’homme, son appropriation de l’ancien espace industriel dépend de nombreux facteurs qui ne résultent pas exclusivement de critères techniques de remise en état.
Outre la lutte contre les nuisances de voisinages engendrées par la proximité de résidents, l’activité industrielle exercée et le charroi induit, les évolutions survenues dans le monde des carriers (industrialisation de cette activité) et la mise en place des garanties financières permettent aujourd’hui de réaliser des opérations de réaménagement intéressantes.
La plus grande difficulté réside dans la fixation d’une vocation des espaces en fin d’exploitation plus que dans la réalisation technique et physique de la remise en état définie.
Dorénavant, les élus et leurs administrés ainsi que les propriétaires des terrains veulent connaître la vocation future du site dès le début de l’extraction et l’exploitant doit se montrer attentif à cette demande pour proposer des solutions à la fois assez précises et assez ouvertes pour répondre à ces attentes.
Les sites les plus faciles à réaménager sont ceux de roches meubles en eau ou à sec qui ont les durées d’exploitation les plus faibles (15 ans en moyenne). Par contre, les sites d’exploitation de roches massives sont plus difficiles à réaffecter à cause de leur durée de vie (supérieure à 30 ans dans la région).
Faute d’expérience et de recul, les sites d’exploitation doivent faire l’objet d’efforts particuliers et nécessitent une véritable réflexion sur leur affectation future en concertation avec les élus et les riverains et ne doivent pas conduire à considérer que les zones d’exploitation et leur périphérie sont des zones sacrifiées pour un usage futur.

Principes à respecter

Les projets de réaménagement doivent prendre en compte les principes suivants :

  • atténuer les impacts en cours d’exploitation (exploitation en dent creuse à privilégier, réaménagement coordonné à l’exploitation, prise en compte de l’hydrologie, l’hydrogéologie, le voisinage, etc…),
  • atténuer les impacts en stade final en prévoyant un réaménagement adapté au contexte local (carrière en eau ou à sec, zone rurale ou urbaine, …),
  • pérenniser les réaménagements en identifiant le plus en amont possible le gestionnaire futur de l’espace créé par l’exploitation et en précisant les conditions techniques et financières de gestion (environnementale et d’accès) au travers d’une convention. Ce gestionnaire pourra être un propriétaire privé, une collectivité locale, un syndicat d’aménagement, etc…
  • mettre le site en sécurité vis-à-vis notamment des risques de chute de pierre, de noyade, de chutes et d’instabilité des remblais.

L’ensemble de ces principes doit être évoqué lors des réunions du comité local de suivi et de concertation s’il existe, afin de maintenir les options ouvertes et faire évoluer si nécessaire les idées émises à l’origine. Une carrière ne constitue qu’une phase de la vie d’un site mais peut être relativement longue dans le cas des carrières de roches massives (le demi-siècle voire plus). Le choix du site et les conditions d’exploitation doivent donc conduire à limiter les impacts en particulier paysagers, pendant toute cette période.
La fin d’un site de carrière devrait ouvrir des perspectives nouvelles d’aménagement de l’espace ainsi créé. Bien qu’il soit parfois difficile de faire adhérer la collectivité à un projet prévu plus de 50 ans plus tard, rien n’interdit d’envisager des solutions différentes alliant réutilisation (urbanisation, agriculture, loisir) et réinsertion dans le paysage.

Les tableaux ci-après récapitulent les réaménagements possibles.

La remise en état de sites en espace rural

En espace rural, les aménagements d’espaces naturels ou à vocation agricole sont, bien entendu, privilégiés. Le tableau suivant permet de faire un inventaire des principales remises en état possibles par type d’extraction constatées en France.

La remise en état de sites en espace urbain

Exemples de réaménagements


Carrières de roches massives

Pour les exploitations en roche massive, les écueils à éviter sont principalement les réaménagements trop typés (caractère linéaire des gradins et banquettes), l’impact visuel important, la trop grande profondeur de l’excavation, la présence de stocks aériens de stériles et d’anciens bâtiments d’exploitation.

Carrières alluvionnaires à sec

Il convient, pour ce type de carrière, d’éviter le mitage d’exploitation, de prendre garde à la qualité des éventuels matériaux de remblaiement, de veiller à garder une épaisseur minimale de matériaux au-dessus des plus hautes eaux de la nappe (justifiée par une étude hydrogéologique), et d’être attentif sur l’activité agricole éventuelle future qui doit exclure l’utilisation abusive d’engrais et de pesticides. La nappe étant plus vulnérable du fait de l’extraction d’une partie du matériaux qui la recouvrait). Carrières alluvionnaires en eau
Il convient également d’éviter le mitage de plans d’eau et de veiller à éviter la juxtaposition de petit plans d’eau clôturés par des haies de résineux.

Conclusion

La richesse des possibilités de réemplois des sites quel que soit le type d’exploitation considéré montre que tous les sites d’anciennes carrières peuvent trouver une vocation après l’exploitation. Il faut pour cela que l’étude et le montage d’un dossier de demande d’autorisation soient mis à profit par l’exploitant, le propriétaire et les collectivités pour définir une vocation ultérieure au site et que le phasage d’exploitation prenne en compte cet usage ultérieur afin de libérer au plus tôt les espaces remis en état.
Il n’existe pas ou peu de contraintes techniques à la réalisation des travaux destinés à redonner un usage à une ancienne exploitation.
Par contre, la vocation de l’espace et sa gestion ultérieure ne peuvent être que le résultat d’une concertation qui associe l’exploitant à d’autres partenaires (maires, associations,…).
Lors des remises en état en site naturel, les suivis opérés montrent que des réaménagements bien conçus peuvent contribuer au développement de la biodiversité et offrir des habitats originaux colonisés par des espèces pionnières adaptées ainsi que des zones de refuge pour des animaux ou plantes dont certaines en régression.
Pour la remise en état d’un site à proximité d’une agglomération, l’exploitant de carrière, devient un acteur incontournable de l’aménagement du territoire urbain.

Partager la page

S'abonner