Les méthodes d’exploitation souterraine

L’art d’exploiter la mine remonte à l’antiquité et s’est perfectionné tout au long des siècles.
Avant de décrire quelques méthodes d’exploitation, quelques éléments de géologie sur la formation des gisements permettront de mieux comprendre comment extraire les matériaux.

On distingue 3 types de gisement selon leur formation :

  • Les amas,
  • Les filons,
  • Les couches.

On appelle amas, les gisements de forme quelconque, généralement sous forme de lentille ou de sphère dont les 3 dimensions (longueur, largeur, profondeur) sont de même grandeur. Le soufre se présente sous forme d’amas dans la région de Marseille.
On nomme filons, les gisements constitués par le remplissage, en général irrégulier et discontinu, de fractures préexistantes de l’écorce terrestre par des minerais divers. Les gisements de plomb argentifère de Vallaury (Var) ou de l’Argentière-la-Bessée (Hautes Alpes) sont dits "filoniens".

Enfin, on désigne par couches, les gisements dont la masse, compacte et régulière, se trouve comprise entre 2 plans parallèles, ces gisements sont en général d’origine sédimentaire. C’est le cas notamment pour le lignite qu’on trouve dans le bassin minier de Gardanne (Bouches du Rhône).

Les méthodes d’exploitations souterraines que l’on décrit ci-après, ne posent que les principes d’extraction du minerai, quelle que soit la méthode choisie, avant d’arriver au gisement, des travaux d’installation importants doivent être réalisés : creusements de puits d’accès et d’acheminement du personnel et du matériel, création d’une circulation d’air frais, création des pistes de circulation des engins ou mise en place de convoyeurs pour l’acheminement du personnel et le transport du minerai vers l’extérieur…

Les méthodes d’exploitations souterraines se classent suivant 3 grandes catégories :

La méthode par chambres et piliers, elle permet d’accéder à tout type de gisement

C’est une méthode d’exploitation très répandue dans les exploitations à faible profondeur (jusqu’à quelques centaines de mètres au dessous du niveau du sol).
Le principe est d’enlever du minerai tout en laissant en place des piliers qui assurent le maintien des terrains situés au dessus du gisement.

Suivant la qualité du matériau, l’épaisseur de l’extraction, la hauteur des terrains au dessus de la zone d’exploitation, la dimension des piliers laissés en place est plus ou moins importante. La hauteur des piliers de la carrière de Sarragan aux Baux de Provence (Bouches du Rhône) atteint plusieurs dizaines de mètres. Par contre, dans l’ancienne mine du Chardonnet (Hautes Alpes), les piliers ne s’élèvent qu’à 50 centimètres en moyenne.
L’espace dégagé entre les piliers s’appelle la chambre d’où le nom de la méthode.

Lorsqu’en fin d’exploitation les piliers sont laissés en l’état et que les chambres ne sont pas comblées par des matériaux stériles, on parle d’exploitation "par chambres et piliers abandonnés". La stabilité des terrains au dessus de la zone d’extraction est fragilisée.
Si en cours d’extraction ou à la fin de l’exploitation, les chambres sont remblayées, ou lorsque les piliers sont effondrés, les terrains situés au dessus de la zone d’extraction, présentent moins de risques d’effondrement que lorsque les chambres sont abandonnées, sauf si le minerai extrait se dissout dans l’eau.

La méthode par tranches (ascendantes ou descendantes), plutôt adaptée à des gisements filoniens ou en couche redressées,

Cette méthode d’exploitation a été mise au point pour extraire les matériaux dans les zones des gisements de fort pendage. Les mouvements de terrain ont pu dans certains bassins sédimentaires plisser les couches de minerai qui ne sont plus horizontales mais plus ou moins verticales. Le gisement peut se présenter comme suit :

La méthode doit permettre d’accéder dans les parties verticales du gisement tout en assurant la sécurité du personnel. Le gisement est attaqué par la base et l’exploitation remonte le long du filon.
La méthode s’accompagne généralement de remblaiement des zones exploitées.

La méthode par longues tailles avec soutènement marchant, adaptée aux gisements importants plutôt horizontaux.

Cette méthode d’exploitation est née avec la modernisation des mines au cours du XXème siècle. Elle est essentiellement utilisée d’abord dans les gisements de charbon du nord, de la Lorraine, du bassin de Saint Etienne avant d’arriver en Provence.
Le principe est d’extraire le minerai sur de long panneaux (en moyenne 200 mètres) sur des hauteurs variables (environ 3 mètres), par le passage d’un engin d’abattage et de laisser les terrains s’effondrer après avoir récupéré le minerai. Au lieu de laisser en place un pilier ou de remblayer la zone d’exploitation, on abrite le personnel et le matériel provisoirement pendant l’extraction par un soutènement marchant qui se déplace en même temps que l’engin d’abattage.

A Gardanne, L’exploitation est complètement mécanisée, l’abattage du lignite se fait par un rabot qui circule sur un rail entre les 2 extrémités de la zone d’extraction. Le charbon tombe alors par pression dans un convoyeur blindé qui évacue les matériaux hors de la zone d’extraction.

A Gardanne, le pilotage du rabot et de l’ensemble de l’installation (piles hydrauliques du soutènement, convoyeur blindé) se fait à distance à une extrémité de la taille. Un système de vérins hydrauliques permet de faire avancer l’installation pour se caler à nouveau à la base de la couche de minerai afin de recommencer le cycle de production.

Cette méthode permet de ne pas laisser de vides souterrains en fin d’exploitation, mais peut générer des secousses sismiques provoquées par la rupture du terrain, pendant la période d’extraction, qui sont ressenties au fond et au jour.


Deux exemples d’anciennes exploitations souterraines

Ancienne exploitation de gypse de Roquevaire

Roquevaire
A l’est de la commune de ROQUEVAIRE s’étend une zone appelée "les Plâtrières", entre le village et l’autoroute A52. Le sous sol de cette zone est constitué en partie de gypse qui est utilisé dans la fabrication du plâtre

Les extractions de gypse ont commencé dès 1800 pour se terminer définitivement en 1963. La méthode d’exploitation était celle des chambres et piliers abandonnés. Plusieurs exploitants se sont succédés : RANCUREL, PONTET, PLATRIERES DU VAUCLUSE.
Le gypse a été extrait par le creusement de chambres d’extraction de 3, 5 et 7 mètres de hauteur selon les niveaux. Les matériaux étaient extraits très proche de la surface et remontés par des puits de petit diamètre (2 mètres) jusqu’en 1905 et par des plans inclinés ensuite.
Pendant la période d’extraction, des éboulements se sont produits, de rares comblements ont été réalisés mais ils n’ont pas d’effets sur la stabilité générale des travaux.

A partir de 1957, une partie de l’exploitation a été réservée à la culture des champignons, il s’agit des galeries centrales les plus hautes et les plus proches de la surface. Cette activité a été arrêtée en novembre 1995 par la suite des risques d’affaissement apparus en surface et en sous sol.

Les terrains au dessus desquels ont eu lieu les travaux d’exploitation sont actuellement occupés par un habitat dispersé.

L’extraction de gypse s’est faite sur plusieurs niveaux, aujourd’hui les niveaux inférieurs sont en eau car les pompages mis en place pendant la période d’activité ont été arrêtés et le niveau de la nappe phréatique est remonté. Il reste aujourd’hui seulement un pompage qui maintient hors d’eau la zone des anciennes champignonnières.

Compte tenu du type d’exploitation, on peut identifier 2 types principaux de mécanismes de dégradation susceptibles de provoquer des mouvements de terrain : le fontis et l’effondrement en masse.

Le phénomène de fontis est lié à la rupture localisée du toit d’une galerie ou d’une chambre qui progresse jusqu’en surface. Il se traduit en surface par des affaissements localisés du sol.
L’effondrement en masse est lié à la rupture d’un ou plusieurs piliers qui provoque l’apparition en surface d’un effondrement de grande ampleur.

Ces phénomènes peuvent être accentués par des facteurs aggravant tels que la circulation de l’eau souterraine, l’existence d’une voie de circulation importante en surface, les vibrations causées par la présence de poids lourds.

L’effet du temps conduit généralement et dans un délai indéfini à des dégradations de surface au dessus des anciens travaux surtout lorsqu’ils sont peu profonds.

Pour cette exploitation de ROQUEVAIRE, le site des travaux a été abandonné sans surveillance depuis 1963 et l’existence même de l’extraction a été "oubliée" en moins d’une génération, ce qui a conduit à une urbanisation de la zone sans précaution. Ce n’est qu’à partir d’affaissements récents (1995) et de l’évacuation de certains immeubles pour raisons de sécurité que des mesures en matière de règlement d’urbanisme on été prises.

Des études confiées par le ministère de l’environnement à l’INERIS et au BRGM ont permis d’identifier les zones les plus fragilisées et d’analyser les venues d’eau souterraines et leur composition. Elles préconisent des mesures de surveillance et ont servi de base à l’élaboration d’un Plan de Prévention des Risques naturels (PPR) rédigé par la direction départementale de l’équipement.

Ancienne exploitation de gypse de de Saint-Pierre les Martigues

Photo du site en 1985, en cours d'exploitation
Le hameau de SAINT PIERRE LES MARTIGUES a connu une exploitation souterraine de gypse. Le gisement d’une épaisseur d’environ 100 mètres s’étend d’ouest en est sur 3,5 kilomètres.

Les travaux d’extraction ont commencé en 1900 et se sont arrêtés en 1987.
Jusqu’en 1935, les extractions se faisaient par des puits qui étaient élargis dans la couche de gypse (méthode des bouteilles). Cette méthode artisanale est restée localisée dans le périmètre de l’ancienne usine. Les vides creusés par l’exploitation n’étaient pas comblés.

De 1935 à 1960, la technique d’extraction par chambres et piliers abandonnés fut mise en place avec une mécanisation vers les années 1950. 3 niveaux (aux cotes -14, -25 et -36 mètres NGF)ont été réalisés avec des piliers de 7mx7m sur une hauteur de 7 mètres. La hauteur de minerai laissée en place entre 2 niveaux, appelée la planche, est de 4 mètres.

A partir des années 1960, la hauteur entre 2 niveaux est portée à 10 mètres pour des piliers de même taille que précédemment.

En 1985, l’exploitation est déplacée à l’est de la route départementale 49, route de la Couronne, et s’effectue selon la même méthode avec des piliers résiduels de 40mx40m. Elle s’est arrêtée en 1989. A l’arrêt des travaux certains étages d’exploitation ont été remblayés.

L’exploitation n’avait pas été administrativement close avant 1993, elle est donc soumise depuis aux dispositions du livre V du Code de l’environnement.

Pendant la période d’extraction, des pompages d’eau permettaient de travailler hors d’eau, depuis 1989, ces pompages sont arrêtés et les différents niveaux sont noyés. Le niveau d’eau sera stabilisé autour de 2005, en attendant, un arrêté préfectoral oblige l’exploitant à surveiller la hauteur d’eau dans les galeries avant un éventuel débordement et à étudier toutes mesures utiles à cet effet.

Un procès verbal de récolement a été établi pour acter que l’exploitant LAFARGE PLATRES a exécuté les travaux de remise en état conformément aux prescriptions de l’arrêté préfectoral complémentaire pris pour la remise en état du site.

Cet acte administratif n’exonère pas l’ancien exploitant de toute action ultérieure sur la zone de travaux mais permet aux services de la direction départementale de l’équipement d’élaborer d’un plan de prévention des risques (PPR) opposable aux documents d’urbanisme. Ce PPR doit permettre de conserver la mémoire des zones de travaux et d’interdire la construction de nouveaux immeubles au dessus des terrains les plus sensibles.

Des phénomènes de tassement et des effondrements partiels se produisent sur tout le secteur des travaux. Les terrains appartenant à LAFARGE PLATRES, sont même clôturés pour éviter que des personnes non initiées aux risques pénètrent dans ces zones.

Une étude des mouvements de terrains qui peuvent découler de cette ancienne exploitation a été réalisée et validée par un expert. Elle sert de base à la rédaction du PPR. L’exploitant a l’obligation de surveiller les mouvements et d’intervenir pour réparer les préjudices de surface.

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